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Qu’est ce que le bronze français ?

Face aux bronzes allemands et italiens, mieux connus des collectionneurs, les bronzes français sont longtemps restés dans l’ombre et sont donc, parfois encore aujourd’hui, moins facilement identifiables. Pourtant, ils sont très présents dans les musées français et internationaux, ainsi que sur le marché de l’art.

Le bronze est un médium particulier, matériau royal par excellence grâce aux commandes de copies d’antiques, de grandes statues équestres et de monuments funéraires. Il plait aussi aux collectionneurs privés, car il présente une potentialité de formes et de patines quasiment infinies ainsi qu’une grande résistance aux aléas du temps. 

  Tireuse d’épine, Ponce Jaquio
Tireuse d’épine, Ponce Jaquio

Les bronzes français : histoire d’une méconnaissance

À partir du XVIe siècle, le bronze français connait un fort renouveau grâce à la venue de sculpteurs italiens qui s’installent à Paris et aux alentours, tels que Primatice ou Benvenuto Cellini, et qui donnent l’impulsion nécessaire à la création d’un nouveau type d’artiste : le sculpteur-fondeur, ou sculpteur spécialisé dans le bronze, tels Barthélemy Prieur, Mathieu Jacquet ou encore Michel Anguier pour les petits bronzes, dont les modèles ont eu un réel « succès commercial ». 

 Woman Bathing,  Barthélemy Prieur
Woman Bathing, Barthélemy Prieur

Sous le règne de Louis XIV et avec l’introduction à Versailles de la statuaire en bronze, le bronze français connait une période de développement sans précédent et, là encore, certains sculpteurs font preuve d’une remarquable technicité dans la fonte de bronze, tels que François Girardon, Antoine Coysevox ou Corneille Van Clève. Cependant, la place du fondeur tend à s’affirmer, notamment à travers la figure de Balthazar Keller et de sa très célèbre fonderie de l’Arsenal, qui fournira Versailles en statues ; celui-ci n’hésite pas à signer ses bronzes, au même titre que le sculpteur. 

Au XVIIIe siècle, le bronze monumental est présent partout dans l’espace public français : fontaines, statues ornant les places royales, bas-reliefs, etc. Parallèlement, le goût des collectionneurs privés pour le petit bronze fondu à la cire perdue est plus fort que jamais et ceux-ci ornent les grands appartements, au même rang que la peinture ou la porcelaine. Les réalisations en bronze sont d’une extrême délicatesse et se déclinent dans tous les arts décoratifs, sur les pendules, le mobilier, les flambeaux… À cette époque, l’alliance entre un sculpteur et un fondeur-bronzier est la plus répandue. 

La Fontaine des Girondins, Bordeaux
La Fontaine des Girondins, Bordeaux

Le XIXe et l’explosion de l’industrie du bronze

Les années 1830-1840 voient l’avènement d’une réelle industrie du bronze, grâce à l’explosion du bronze d’édition, permise par des avancées technologiques : les progrès réalisés dans la fonte au sable ainsi que l’invention par Achille Collas en 1839 d’un procédé permettant la reproduction d’objets sculptés. 

Au début de cette industrie, la norme était que le sculpteur vende le modèle ainsi que l’intégralité des droits de reproduction à l’éditeur, qui les fera réaliser en bronze par un fondeur. Plus tard, le sculpteur et le fondeur partagent des liens plus étroits, le dernier conseillant le premier sur les goûts du public ou présentant ses sculptures sur catalogue, en diverses dimensions et patines.

Les grands fondeurs-éditeurs de l’époque, Ferdinand Barbedienne, Thiébaut ou les frères Susse, reproduisent de manière illimitée les bronzes des plus grands sculpteurs de l’époque : François Rude, Carrier-Belleuse, Barye, Jules Dalou, Pierre-Jules Mène. Les sujets les plus répandus à cette époque sont tirés de l’Antiquité et de la mythologie, la statuette animalière connait également un franc succès. 

Buste de Molière, Ferdinand Barbedienne
Buste de Molière, Ferdinand Barbedienne

Notons que les sculpteurs font également appel aux fondeurs-éditeurs pour des œuvres de grande envergure, tel Jules Dalou à la fonderie Thiébaut Frères pour son monument Le Triomphe de la République, aujourd’hui place de la Nation à Paris. Toutes ces œuvres portent les marques des fondeurs-éditeurs qui permettent une identification assez rapide. Néanmoins attention, car les copies sont nombreuses ! 

À la fin du XIXe siècle et au XXe siècle apparait l’habitude de numéroter les bronzes d’édition et d’en tirer un nombre limité. Cette limitation devient alors une réelle plus-value pour faire valoir la qualité et l’authenticité de l’œuvre. Les grandes fonderies du XIXe siècle continuent leur activité comme Thiébaut Frères ou encore Barbedienne, le principal fondeur de Rodin, tandis que d’autres apparaissent, telle la fonderie Rudier qui travaille avec les plus grands sculpteurs du siècle : Rodin, Maillol, Bourdelle ou encore Daumier. Aujourd’hui, la principale fonderie française est la fonderie de Coubertin, qui accueille et forme des sculpteurs-fondeurs contemporains. 

Les fondeurs les plus recherchés par les collectionneurs

Les petits bronzes du XVIe et XVIIsiècles ont subi de grosses pertes, notamment à cause des fontes révolutionnaires et les objets de cette époque qui nous sont parvenus proviennent principalement de grands ensembles royaux ou religieux. Les autres statues et statuettes privées, rares, sont conservées dans les plus grands musées : le musée du Louvre en conserve une exceptionnelle collection. Ainsi, lorsqu’une œuvre d’un grand sculpteur de cette époque est acquise sur le marché de l’art, les prix de vente s’envolent comme dans le cas du buste en bronze de Paul Phélypeaux de Pontchartrain par Francesco Bordoni, adjugé 2 400 000 euros à Drouot, par la maison De Baecque et Associés en novembre 2019.

Les bronzes XVIIIe sont également très recherchés par les collectionneurs : autant les petits bronzes statuaires que les bronzes d’ameublement sont encore très appréciés. 

Les bronzes d’édition du XIXe et XXe  siècles sont assez présents sur le marché et selon leur qualité et leur rareté, les prix de vente varient considérablement. Ainsi, un bas-relief signé Barbedienne, représentant quatre nymphes a été adjugé plus de 20 000 euros à Drouot en 2015. Notons également que les collectionneurs anglo-saxons sont très friands des petits bronzes d’édition française.

Enfin, grâce à l’explosion des moyens de reproductibilité technique des œuvres d’art, les copies des bronzes d’édition du XIXe et XXsiècles sont très nombreuses, une expertise du bronze est donc nécessaire avant toute vente afin de tirer le meilleur parti d’un objet qui peut se révéler exceptionnel.

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