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Sur quel fondement est-il possible d’engager la responsabilité du commissaire-priseur ?
En cas de manquement chaque individu peut voir sa responsabilité engagée soit du fait d’un manquement dans l’exécution d’un contrat (article 1231-1 du Code civil) soit du fait d’une faute commise en dehors même de l’existence d’un contrat (article 1240 du Code civil).
Ainsi les professionnels du marché de l’art quels qu’ils soient — commissaire-priseur, expert, antiquaire, galeriste, courtier — ne sauraient échapper à leur responsabilité qui pourrait être engagée dans le cadre de l’exécution de leurs activités (ventes, achats, expertises).
Les commissaires-priseurs notamment ont de nombreuses obligations envers leurs acheteurs et vendeurs dont le manquement entraînerait l’engagement de leur responsabilité. Si parfois le litige se règle devant le Conseil des ventes volontaires (CVV) ou les tribunaux judiciaires, il existe également des solutions amiables.
Une responsabilité aux sources diverses
Figure essentielle du marché de l’art, le commissaire-priseur est le principal acteur des ventes aux enchères publiques. Assisté par ses experts, il peut voir sa responsabilité engagée — c’est-à-dire « obligation de répondre d’un dommage devant la justice et d’en assumer les conséquences civiles, pénales ou disciplinaires » — en cas de manquement à ses obligations. En effet, le commissaire-priseur a notamment des obligations liées à l’organisation de ses ventes et à la description des œuvres proposées à la vente.
Responsabilité délictuelle et contractuelle
Afin de mieux comprendre les sources de l’action en responsabilité du commissaire-priseur qui seront détaillées ultérieurement, il est important de rappeler que sa responsabilité peut être de nature délictuelle ou contractuelle ou dans certains cas les deux à la fois.
Lorsque le commissaire-priseur commet une faute à l’égard de son acheteur, ce dernier peut engager la responsabilité délictuelle. L’acheteur intentera donc une action pour faute.
En revanche, un contrat a été passé entre le commissaire-priseur et le vendeur. Par conséquent dès lors qu’un manquement est constaté, le vendeur peut engager la responsabilité contractuelle du professionnel dans le cadre d’une action en nullité du contrat.
L’organisation des ventes aux enchères publiques
Les lois du 10 juillet 2000 et du 20 juillet 2011 ont mis à la charge du commissaire-priseur diverses obligations. L’organisation des ventes aux enchères peut donner lieu à l’engagement de la responsabilité du commissaire-priseur pour diverses raisons : produit de vente non réglé, objet non vendu non restitué, vente sans mandat signé, objet adjugé à vil prix, prix de réserve non respecté, etc.
Ainsi, le 15 avril 2016, la Cour de cassation a reconnu la responsabilité délictuelle du commissaire-priseur pour avoir estimé trop faiblement un tableau de Zao Wou-Ki malgré l’estimation plus élevée de l’expert de la vente et pour défaut de mandat signé. La Cour précisa que les opérateurs de ventes devaient :
La description des œuvres
Donnée essentielle pour conclure une vente, la description des œuvres concerne à la fois les commissaires-priseurs et leurs experts.
La description figure dans le catalogue de vente. Elle a trait à l’authenticité de l’œuvre, sa provenance, mais également à son état (restauration). Le 21 octobre 2000, la Cour de cassation est venue rappeler la responsabilité du commissaire-priseur en matière d’authentification d’une œuvre tout en précisant que de ce dernier « ne peut s’en exonérer en arguant du fait qu’il a eu recours à un expert indépendant ». En qualité de professionnel du marché de l’art, le commissaire-priseur doit faire preuve d’une attention particulière aux objets, mais également à l’expertise effectuée.
Mais si la sollicitation d’un expert ne permet pas au commissaire-priseur d’échapper à sa responsabilité, cela lui permet d’engager solidairement la responsabilité de ce dernier. Le Code du commerce précise que les experts assistent les commissaires-priseurs « dans la description, la présentation et l’estimation des biens » et exclut toute clause limitative de responsabilité. Le Code poursuit en indiquant que l’expert est « solidairement responsable avec l’organisateur de la vente pour ce qui relève de son activité ».
Si la responsabilité du commissaire-priseur peut être engagée en cas de manquement à ses obligations, encore faut-il réaliser son action dans les temps.
La prescription des actions en responsabilité
Une prescription quinquennale
Quels que soient les acteurs du marché de l’art concernés, la prescription est toujours quinquennale, c’est-à-dire une prescription de cinq années. Depuis 2008 cette prescription est fixée pour les commissaires-priseurs et les experts par l’article L.321-17 du Code du commerce.
La durée est la même pour tous les acteurs, mais également quel que soit le fondement de l’action en responsabilité envisagée : action contractuelle ou action délictuelle.
Le point de départ de la prescription
En principe, le délai de prescription court à compter du jour où l’individu a connu ou aurait dû connaitre les faits permettant d’exercer la responsabilité.
Or, le point de départ de la prescription de la responsabilité du commissaire-priseur est dérogatoire au droit commun. Ainsi, les actions en responsabilité à l’occasion d’une vente volontaire ou judiciaire se prescrivent par cinq ans à compter de l’adjudication de l’œuvre.
Nous avons tendance à mener nos actions devant les tribunaux. Néanmoins, dans certains cas, il conviendrait d’envisager de régler le litige à l’amiable.
Le règlement à l’amiable des litiges liés aux ventes
Face à un litige, le commissaire-priseur a tout intérêt à trouver une solution à l’amiable : conciliation, arbitrage, etc. Toutefois, le marché de l’art n’est pas le domaine qui se prête le mieux à une résolution amiable des litiges. L’authenticité est souvent au cœur des actions en responsabilité. Or, il s’agit d’un domaine très complexe, car l’histoire de l’art évolue sans cesse, des comités, experts, spécialistes se consacrent à des artistes en particulier et font autorité tandis que les avis des ayants droit peuvent être guidés par un intérêt hégémonique ou pécuniaire. De leur côté les tribunaux ont pris conscience de cette complexité. La jurisprudence plus réaliste qu’auparavant appréhende les rôles et connaissances de chacun.
En revanche, lorsque le litige est simple et met en cause un petit nombre d’intervenants alors le recours à un médiateur peut sembler adapté. Ce dernier guidé par son impartialité devra être neutre et objectif, ce qui n’est pas toujours le cas.
Ainsi, tout dépend de la nature du litige, des parties, de l’enjeu économique, etc.
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