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Qu’est-ce que l’école de Pont-Aven ?
Dans la lettre envoyée à la fin du mois de septembre 1888 à Vincent Van Gogh, Paul Gauguin décrit La vision après le sermon, aujourd’hui conservée à la galerie nationale d’Écosse à Édimbourg, la première de ses toiles religieuses et une œuvre décisive car elle révèle les nouvelles préoccupations picturales de l’artiste que sont un usage subjectif de la couleur et une composition synthétique. Le chromatisme n’est pas ici utilisé dans un but de vraisemblance, mais d’expressivité : la révolution de Pont-Aven est en marche.
Paul Gauguin à Pont-Aven
Le premier groupe
En 1886 eut lieu la huitième et dernière exposition impressionniste, où les clivages entre les peintres étaient consommés : à Monet qui se confortait dans une analyse vériste de la nature répondait Cézanne, qui souhaitait que la peinture ait une plus grande liberté. C’est de lui que Paul Gauguin se réclame, lui qui le connaissait ayant participé à plusieurs expositions impressionnistes, et ajoute à sa soif créatrice une envie de départ et de retour aux formes primitives de l’art. C’est pour cela qu’il part pour la Bretagne, qui était célébrée à la même époque par Ernest Renan. Il choisit néanmoins la ville de Pont-Aven pour des raisons pécuniaires : il y avait une auberge à prix modeste, bien connue des artistes où il séjourne pour la première fois de juin à novembre 1886. Il y peint quelques toiles, mais c’est surtout lors de son second séjour en 1888 (après un voyage à la Martinique « loin de tous les hommes »), que Gauguin établit ses premières révolutions picturales.
Auprès de lui se forme un premier groupe d’artistes formé de Maxime Maufra, Henri de Chamaillard, Henry Moret, Cuno Amiet, Charles Laval (qui avait accompagné Gauguin en Martinique) et Emile Jourdan. Ils sont dits « le premier groupe de Pont-Aven », bientôt rejoins par Emile Bernard. Ils expérimentent ensemble le synthétisme et le symbolisme avant de poursuivre d’autres voies, comme Maufra qui retournera à l’impressionnisme.
La rencontre avec Emile Bernard et l’émergence du cloisonnisme
Au mois d’août 1888 arrive à Pont-Aven Emile Bernard, un jeune peintre à peine âgé de vingt ans, que Gauguin avait déjà rencontré deux ans auparavant. Précoce, doué, intelligent, Emile Bernard, aidé de son ami Louis Anquetin, avait déjà mis au point une nouvelle technique picturale qui consistait à appliquer sur la toile de larges teintes cernées d’un trait noir, très inspirée par les procédés de fabrication des vitraux et des émaux. Cette volonté de simplification rejoignait les aspirations de Gauguin qui vit dans le jeune peintre un jeune alter ego de qui il apprenait et à qui il enseignait (« l’un était pour l’autre élève et maître », Jean Verkade).
Bernard et Gauguin confrontent leurs idées et leurs travaux, à cette époque Bernard peint Bretonnes dans la prairie et Gauguin La vision après le sermon, dit aussi La lutte de Jacob avec l’ange, qui donnent naissance au Synthétisme et au Cloisonnisme.
Paul Sérusier, le diffuseur
Le talisman
Paul Sérusier, un jeune élève de l’Académie Jullian rencontre à son tour Paul Gauguin à Pont-Aven, en septembre 1888 juste après que ce dernier ait élaboré ses dernières thèses picturales, le Cloisonnisme et le Synthétisme. Déjà imprégné d’une grande spiritualité, Sérusier est bouleversé par les thèses de Gauguin qui prônent l’exaltation de la couleur pure, la simplification des formes en un seul trait qui en exalte la force et le caractère et la substitution de l’image par le symbole. Il peint alors Le Talisman, paysage au bois d’amour, une huile sur bois réalisée à Pont-Aven en 1888 sous la direction de Gauguin : « Comment voyez-vous cet arbre : il est bien vert ? Mettez donc du vert, le plus beau vert de votre palette ; et cette ombre, plutôt bleue ? Ne craignez pas de la peindre aussi bleue que possible. »
Le retour à Paris
Sérusier revient à Paris muni de ce fond de boite à cigares recouvert d’aplats de couleurs pures (aujourd’hui conservé au musée d’Orsay), bien décidé à convertir à cette nouvelle esthétique ses jeunes élèves de l’Académie Jullian où il est désormais professeur. Autour de lui gravitent Pierre Bonnard, Maurice Denis, Henri-Gabriel Ibels et Paul-Elie Ranson, bientôt rejoint par Roussel et Vuillard, puis Maillol et Vallotton en 1892. Ils seront les « prophètes » de la peinture, les Nabis.
La révolution de 1889
Le café Volpini
Le café Volpini à Paris est le lieu de transmission et d’exposition des théories picturales établies en Bretagne : en 1889, alors que l’Exposition Universelle bat son plein, y sont exposées les toiles d’Emile Bernard, Paul Gauguin, Louis Anquetin et Schuffenecker et d’autres, réunis sous le nom de groupe impressionniste et synthétiste. Cette exposition est exemplaire et décisive, tant pour eux que pour le public qui s’intéresse alors aux ventes de l’école de Pont-Aven.
Le Pouldu
Suite à l’événement du café Volpini, Paul Gauguin retourne en Bretagne. Pont-Aven étant déjà assailli par les touristes, le peintre s’installe non loin, au Pouldu où il résidera durant presque un an, d’octobre 1889 à novembre 1890, toujours entouré d’un groupe d’artistes : Meyer de Haan, Armand Séguin, Charles Filiger et d’autres. Durant cette année, il confirme son esthétique et produit beaucoup. Il a surtout apporté aux peintres une grande liberté dans la composition et les couleurs, le droit au lyrisme et à l’expressivité qui sera tant revendiqué dans les avant-gardes du siècle suivant :
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